Popularité des girondins

Alors que la Ligue 1 reprend ce week-end, notre sondage confirme que la cote d'amour des footballeurs bordelais a progressé partout en France''

L'engouement pour les Girondins est en plein boum. Lors de la dernière journée du championnat, plus de 80 000 supporters s'étaient massés aux Quinconces''

Avec 20 % des suffrages, l'OM demeure l'équipe préférée des Français, une position que le club phocéen maintient depuis de longues années. Le fait nouveau vient de Bordeaux, qui bondit à 10 %'', alors que son capital de sympathie se traînait à 3 % lors des précédents sondages réalisés sur la question par l'Ifop (2004, 2005 et 2007). « On peut y voir une sympathie légitimiste. C'est une prime au champion'', ce que confirme l'effondrement de l'OL, de 17 % à 11 % en deux ans. Depuis l'équipe des Zidane et Dugarry, jamais Bordeaux n'avait suscité un tel intérêt ».
Sans surprise, les Girondins réalisent un carton dans le Sud-Ouest (34 %). Mais leur attrait à l'échelle nationale demeure modeste : pas plus de 6 % en région parisienne, dans le Nord-Est ou le Sud-Est. Seule exception, le nord-ouest de la France, où les supporters marine et blanc sont 13 %. On peut y voir un corollaire à l'effacement du FC Nantes, suite à des années de résultats sportifs calamiteux.

« L'ancrage des Girondins dans le public du Sud-Ouest est logique. Le ressort local et régional dans le mécanisme d'identification à un club est très important. Il est d'autant plus fort en France que nombre de clubs, comme Bordeaux, se trouvent en situation d'exclusivité régionale dans l'élite. Ceci va de pair avec la transmission familiale », décrypte Nicolas Hourcade, un sociologue d'origine bordelaise, fin connaisseur du club, qui travaille sur les publics du football à l'École centrale de Lyon.

La sympathie suscitée par les Girondins doit beaucoup à quelques points forts : l'aura de champion du monde de Laurent Blanc, qui reste intacte auprès d'un public qui s'intéresse d'assez loin au quotidien du foot, la belle gueule de Yoann Gourcuff, qui mobilise au-delà des seuls supporters pur sucre, un palmarès solide forgé dans les années 80, des valeurs proclamées de beau jeu et de solidarité, etc. « Bordeaux, ce n'est pas l'image de l'argent-roi, comme à Lyon ces dernières années. L'équipe a progressé régulièrement et a développé un style de jeu qui lui est propre. Ce sont des facteurs positifs »''

Cela dit, cette belle popularité risque fort de s'éroder si les résultats sportifs ne suivent pas cette année. « Il faudrait distinguer les supporters qui mettent en avant la fidélité et qui ne changent pas de club préféré, et ceux qui s'intéressent au foot mais sont moins investis dans le "supportérisme" et suivent tel ou tel club largement en fonction de ses résultats - ce qui explique les fluctuations d'une année à l'autre ».

Sur ce point, Bordeaux a plusieurs longueurs de retard sur l'OM, dont la côte d'amour ne varie guère en dépit d'un palmarès vierge depuis 1993 (à l'exception d'une oubliable Coupe Intertoto''). L'OM, seul vainqueur français de la Ligue des champions, a capitalisé la notoriété et l'affection des fans de foot sur les valeurs d'un club cosmopolite et populaire. « l'OM est devenu le club de la province et des cités'', par opposition au PSG, le club perçu comme celui de la capitale voire des fachos. Ceci s'est construit à une époque charnière, quand une France de spectateurs est devenue une France de supporters. Ce sentiment d'identification est resté très vivace ».

Autant dire qu'il faudrait à Bordeaux plusieurs années de présence au plus haut niveau pour tutoyer la popularité des Phocéens. Sur le chapitre du seul merchandising, ceux-ci écoulent dix fois plus de maillots que les Girondins. Les diffuseurs de télé ne s'y trompent pas. Parmi les affiches de la L1 déjà réservées par Canal+ et Orange Sport pour l'année qui vient, l'OM sera diffusé sept fois'', le PSG et Lyon quatre fois, les Girondins trois fois. Soit le calque fidèle des résultats de notre sondage.

Quelles sont les raisons de l'engouement suscité par les Girondins de Bordeaux depuis le titre ?

Alain Deveseleer : "Cela fait 128 ans que le club existe avec des grands joueurs, des grands entraîneurs. Les Girondins de Bordeaux ont toujours été appréciés. Mais il est vrai qu'avec ce titre on a assisté à un renforcement positif de l'image du club.

Tout d'abord, le fait de gagner le Trophée des champions face à l'OL en début de saison dernière, une victoire en Coupe de la Ligue et une fin de championnat palpitante avec le titre à la clé ont joué en notre faveur. Il y a aussi la Ligue des champions qui nous a offert une exposition supplémentaire au niveau international, ce qui n'est pas négligeable.

En résumé, l'image positive du club, l'équipe, la qualité de jeu qu'elle propose depuis ces dernières années, et n'oublions pas son entraîneur Laurent Blanc, ont permis au club de franchir un palier important cette année".

Concrètement, comment cela s'est-il traduit ?

"Tout d'abord, on a enregistré une augmentation de plus de 50 % de nos produits dérivés (maillots, T-shirts, vêtements de ville...), ce qui représente 5 millions d'euros de chiffre d'affaires. Nous avons vendu 50 000 T-shirts« Champions de France »'', ce qui pour nous est un signe fort d'estime de nos supporters. Le site Internet marche très fort et permet à ceux qui nous suivent à distance de se procurer nos articles. La nouvelle boutique, ouverte à Bordeaux-Lac en août 2008, est un moyen d'exposition supplémentaire. Au niveau des abonnements, nous sommes à 15 000 adhésions (+ 20 % par rapport à 2008), ce qui égale le niveau historique d'il y a dix ans ''; connaissant le contexte économique, c'est vraiment satisfaisant".

Y a-t-il un produit « phare » ?

"Parmi les produits qui marchent fort, le maillot de Yoann Gourcuff se vend effectivement très bien. C'est un garçon doué, mignon, poli, venant d'un club prestigieux et qui a fait de très bons débuts en équipe nationale. Ces éléments jouent en notre faveur. Après, les maillots des cadres comme Alou Diarra, Marouane Chamakh, Fernando Cavenaghi, Marc Planus ou les jeunes pousses, comme Benoît Trémoulinas, marchent aussi très bien".

Enfin, concernant vos sponsors, cette visibilité accrue se traduit-elle par des revenus supplémentaires ?

"En effet, des primes sont prévues dans les différents contrats avec nos sponsors, en particulier avec Puma et Kia, lorsque nous sommes en Ligue des champions, par exemple. C'est une relation gagnant-gagnant : plus nous sommes performants, plus nous sommes visibles, plus nos sponsors sont satisfaits. Après, avec Pichet et Cdiscount, il y a également ce même système mais dans une moindre mesure, puisqu'en Ligue des champions nous n'avons droit de faire figurer sur le maillot qu'un seul sponsor et c'est Kia".

Sud Ouest